Rowena & le Dhole

La fuite avait beau être une attitude de vie, le sorcier et le dhole ne pouvaient s'empêcher d'en avoir marre à chaque fois que cela se répétait. Le coeur battant, semblant prêt à rompre sous l'excès d'adrénaline, les pattes tremblantes mais tenant le coup, la machoire serrée sous le stress de la course poursuite. Les oreilles hésitaient entre deux comportements. Se coucher sur l'arrière du crâne ? Rester à l'affut des aboiements, grognements, cris qui étaient à sa poursuite pour mieux se guider ? Combien de temps cela continuerait encore ? Depuis combien de temps cette course à en perdre haleine existait-elle ? Les ordres fusaient, les sortilèges aussi, habilement esquivés par la fine masse rousse qui sentait les battements de son coeur résonner dans tout son maigre squelette. Le dhole ne comprenait pas pourquoi on en avait après lui. Tout comme il ne comprenait pas cet amat d'hommes et femmes sombres dans leurs âmes, accompagnées de tant de bestioles serviles. Il y en avait eu beaucoup ces derniers temps, c'était croissant. Trop pour continuer de leur échapper indéfiniment. Leur nombre grandissait, tout comme celui de leurs rondes. Une véritable chasse qui durait depuis trop longtemps, qui prenait de plus en plus d'ampleur. A en fatiguer le dhole qui devenait de moins en moins efficace dans ses tentatives de cachette. Qui était de plus en plus éreinté par l'incapacité de dormir les deux paupières closes. Il était resté à l'affut si longtemps, ne s'octroyant que peu de temps pour se reposer. Peut-être était-ce un mauvais plan. Le mauvais plan qui l'avait mis dans une telle panade, sentant sa dernière heure arriver alors qu'il entendait les mètres diminuer entre lui et les autres bestioles folles à lier. L'esprit animal était perdu, épuisé au point ou l'âme voisine, bien lovée dans le pelage et en général si silencieuse, en vint à lui rappeler quelque chose. Tous les Hommes n'étaient pas cruels. C'était l'âge qui les rendait ainsi. La meilleure protection contre l'Homme était l'Homme plus jeune. Plus innocent. Avec une flamme dans le coeur, bien plus efficace que la volonté sombre des adultes.  Alors le museau profitait de la clairière dégagée dans laquelle il arrivait pour retrouver visuellement la plus haute des tours de Poudlard au loin. Même si les billes roulèrent sur l'une de ses voisines, plus petites. Terriblement plus douillette. Une odeur de parchemin s'amusa à bercer la truffe en fuite. Douce madeleine de proust qui réchauffa l'arythmie, d'avantage, pour foncer dans cette direction. Pour user de son dernier souffle là-bas. C'était leur dernière chance. Ni l'animal ni l'humain planqué ne voulaient savoir ce qu'ils leur arriverait une fois capturé par les sorciers qui le chassaient. L'animal ne voulait pas connaitre cette sensation de prison. L'humain ne voulait pas la ressentir à nouveau... Alors, même si le plan était risqué, après tout, il fallait le tenter. La petite caboche se rappelait, s'encourageant dans ce plan : il avait déjà foulé l'orée de la forêt par le passé. Pour de la nourriture seulement, car on y laissait des vivres pour les bestioles les plus affamées ou les plus malines. Cette fois, le dhole décidait d'y aller pour y trouver bien plus. Il l'esperait, du moins. Quitte à s'approcher bien plus de Poudlard, quitte à laisser les coussinets se reposer dans l'herbe fraiche du parc, quitte à s'éloigner de trop de la forêt. Elle était devenue bien trop dangereuse désormais pour Lui.

Les aboiements s'éloignaient, lui lachaiant la grappe. La limite de la forêt semblait, elle, apeurer les assaillants du pauvre dhole. Pourtant, il n'avait pas encore ralenti. Balancé dans sa course, encouragé par son coeur battant, l'animal ne saurait où s'arrêter, ni quand. Il fonçait, à en perdre haleine, à en respirer autant que possible jusqu'à ce qu'une motte de terre ne fasse rouler pitoyablement le corps sur plusieurs mètres, jusqu'à son arrêt complet.

Les bruits de rage, de jalousie -d'appel à l'aide ?- de ses possibles semblables avaient désormais bel et bien disparus. Alors la masse allongée, essoufflée, se laissa sur l'herbe, sur le côté, la cage thoracique se levant difficilement, bien trop rapidement, incapable de prendre de grandes inspirations. La langue débordait des babines assoiffées, gardant les canines apparentes, gardant la gueule ouverte. Les paupières essayaient de rester alerte, sans franc succès. De nombreuses secondes, elles se fermaient, un certain instant, avant de tressaillir et de redécouvrir ce qui l'entourait. Juste une étendue verte, sans âme qui vive. Le rayon de soleil réchauffait le corps étendu, commençant enfin à lâcher du leste sur le besoin de surveillance. Alors, la bestiole se laissa faire par sa perte d'énergie, s'octroyant quelques minutes de repos, finalement, derrière ce petit batiment de pierre dont quelques rêves venaient lui remémorer son intérieur.