Artemis ?… Mais que fais-tu là, mon grand, il faut dormir, voyons !

Je ne vois que le sang. Père n’a pas vu que je suis là depuis longtemps. Alors j’ai tout vu. Ils lui ont fait du mal avant de la tuer. Je sais pas quoi faire. J’arrive même pas à pleurer. Je suis … Choqué. Mon regard plonge dans celui de mon père, dont j’ai hérité mes pupilles si bleues. Il me fait reculer, ferme la porte, m’éloigne des trois autres personnes qui se trouvent dans la pièce, dont Mère. Je l’ai vue. Il souffle, encore.

Merisse !

Notre elfe de maison arrive, en tremblant. Elle va se faire punir parce que je ne suis pas resté dans ma chambre. Elle va être punie à cause de moi, encore. Je vais la garder avec moi, comme ça, elle aura pas à redescendre tout de suite. Mon père n’a pas besoin de dire quoi que ce soit, je le suis. Je monte encore et encore. Je ne réagis même pas quand Merisse me borde. Mais elle reste à coté de moi quand je lui demande. Cette nuit, je ne dors pas, hanté par le bruit des ciseaux, des pinces, des hurlements et le visage crispé de ma tante.

***

La guerre est finie ! L’armée deVoldemort a été décimé. La prison d’Azkaban contient déjà des centaines de détenus et il se pourrait que le Ministère de la Magie demande de l’aide aux pays limitrophes pour…

La radio se coupe. Mon oncle me fixe, soucieux. Je ne me suis pas rendu compte que je pleurais.

Arty… Ca va ?

Il a les joues creusées, les yeux enfoncés dans leurs orbites et les yeux rouges. Lui aussi, il a pleuré. Pas de joie. Il pense à elle. Comme moi. Moi aussi je pense à elle. Et son visage… Et ses cris… Il s’installe près de moi.

Tu sais, tes parents… Tu ne les reverras sans doute… Jamais… Ils ont fait des choses très graves… Et… Tu n’as que huit ans. Je ne sais pas comment tout te dire, mais tu comprends, pas vrai.

Oui. J’ai compris. Je ne lui réponds pas. Ma réponse n’a aucun sens. Mais je suis content de ne plus les voir. C’est bien fait pour eux.

***

Artemis ! Elle est arrivée !

Mon oncle débarque dans la bibliothèque où je me suis installé pour lire, une lettre à la main. Je sais parfaitement ce que c’est, vu que nous sommes le 12 Juillet 2001. Et le sigle de Poudlard sur le dos de l’enveloppe me le confirme. Ça fait longtemps que je sais que je suis un sorcier, depuis que j’ai fait exploser une tourte à la pomme lorsque j’avais six ans. C’était un peu avant la mort de… Sa mort.

Je hausse les épaules. J’en ai rien à faire. Mon oncle reste là, il ne parle pas.

Tu veux emmener tes affaires de peinture à l’école ?

Je me crispe. Non. J’ai un nom à redorer, une réputation à refaire. Je n’ai pas le temps pour ça, je ne dois pas l’avoir. Je fais non de la tête. Il comprendra, après tout, il sait très bien que je suis le rejeton de deux mangemorts et que je vais devoir tout faire pour rattraper ça et ne pas me faire harceler, frapper et humilier tout le temps. Je le sais, moi aussi. Alors à quoi bon faire semblant ? Je vais devoir jouer au petit garçon modèle donc bon… Je l’entends soupirer et quitter la pièce. Il fait ça maintenant, quand il se rend compte que je ne veux pas parler avec lui. Ça lui passera.

***

Mon cher neveu,

Félicitations pour ton entrée à Serpentard. Je suis fier de toi.

J’ai vu que tu avais trouvé ma surprise dans le fond de ta valise. La petite toile que tu m’as envoyée est magnifique. Garde cette passion précieusement, mon grand. Elle t’aidera dans les moments durs de la vie.

Je ne te l’ai jamais dit mais, je t’aime comme mon fils et rien ne pourra changer ça. Ta tante t’aimais et elle t’aurait aimé autant que moi, tu sais. Tu n’es pas responsable de ce que tes parents ont…

Cette lettre n’a jamais été lue en entier et a fini dans le feu de la salle commune de Serpentard.

***

Dix-sept ans. Pas de Quidditch, mais de la natation. Les échecs… La peinture, même si je me dis tous les jours que je devrais arrêter pour de bon.

Sept ans d’études à Poudlard. Je m’en suis mieux sorti que je ne pensais. Mon oncle me trouve paresseux et dit que je pourrais dépasser tout le monde. Je m’en fiche, j’ai la moyenne, même plus, c’est tout ce qui importe. J’ai des potes, je sais ce que je vais faire, quoi dire de plus.

Ah ouais… Ma mère a reçu le baiser du détraqueur après tout ce temps. Elle m’a envoyé une lettre avant. Mais je ne l’ai pas lue. Je m’en fiche d’elle. Elle n’a de mère que le nom. Je n’ai aucune nouvelles de mon père, mais je ne m’attendais pas à en avoir vu qu’il en a jamais rien eu à foutre de moi, ce vieux con. Mon oncle vaut mille fois mieux que lui, même si je ne lui ai jamais dit.

Plus que trois ans, trois années d’études et BAM j’aurais mon putain de diplôme et je pourrais travailler au Ministère. On va tout faire pour, en tout cas. Allez… Plus que trois ans à jouer la comédie ici. Je pourrais aller la jouer ailleurs.