Aujourd’hui, je devais aller voir la professeure d’arithmancie qui était également la directrice de ma maison, Alice Wood. Cependant, il fallait aussi savoir que c’était ma belle-mère puisque c’était l’une des deux mamans de ma petite amie. On pourrait aussi penser que j’aurais pu avoir fait quelque chose de mal pour être convoqué dans son bureau. En effet, je suis préfet et je devais faire mon rapport auprès d’elle.

C’était un samedi après-midi et j’avais passé un chouette moment en compagnie d'Elizabeth dans le parc de l’école comme le soleil avait pointé le bout de son nez. Comme celle-ci avait des choses à faire, nous nous séparâmes et je pris donc la direction de la salle d’arthmancie puisque son bureau se trouvait là-bas. Je toquai puis lorsqu’elle m’invita à entrer, j’ouvris la porte et dit :

- Bonjour professeur Wood.

Il était évident pour moi qu’à Poudlard, je restais dans une relation élève-professeur ainsi que directrice de maison-préfet. Je ne voulais pas que l’on pense que je sois favorisé par rapport aux autres parce que je sortais avec la serdaigle. J’allai m’installer en face de cette dernière comme j’avais pris l’habitude.

- Est-ce que vous voulez savoir ou bien me dire quelque chose en particulier aujourd’hui, professeur ? Demandai-je.

Comme on revenait à peine de vacances, mais que certains élèves étaient restés à poudlard peut-être que la directrice des blaireaux savait des choses dont je n’étais pas au courant. Pour ma part, je n’avais rien remarqué de suspect durant mes dernières rondes qui s'était déroulé la nuit pour la plupart donc je pouvais paraître fatigué.

L’année avait commencé sur les chapeaux de roues et Alice avait profité de son mariage et des nouveautés qui allaient avec. Elle retrouvait également les Poufsouffle en tant que directrice de maison, en plus de ses élèves d’Arithmancie. Pendant les premiers mois, elle avait pris le temps de rencontrer ses étudiants, d’essayer de maintenir une bonne ambiance dans la maison et de s’assurer que tout un chacun savait que son bureau était ouvert en cas de besoin. Elle n’avait pas eu de difficulté pour le faire, sachant que la plupart le savaient depuis un an qu’elle enseignait dans l’école. Même avant qu’elle soit directrice de Maison, c’était le cas.

En ce qui concernait les préfets de Poufsouffle, c’était encore plus simple. Le préfet des Poufsouffle était le petit-ami de Elizabeth, sa fille adoptive, et depuis janvier de l’année dernière, elle le côtoyait régulièrement en privé par sa fille. Ils avaient d’ailleurs passé une partie des fêtes de Noël avec elles. Et Beth était allée chez les Lorist de son côté également. Mais elle tenait à le voir régulièrement pour parler autant de son bien-être que des Poufsouffle et de comment les choses se passaient dans leur maison. Elle prenait à cœur son rôle de directrice et le bien-être des personnes qui faisaient partie de sa maison.

« Entrez », dit-elle en l’entendant frapper à la porte. « Bonjour, Nicolas. Asseyez-vous. »

Alice adoptait un discours intermédiaire dans le cadre de l’école envers le jeune homme. Elle l’invita à s’asseoir et lui proposa une assiette de biscuits. Il semblait inquiet de cette demande de visite. Alice n’avait aucun reproche à lui faire et elle lui sourit rapidement pour le rasséréner un peu. Elle ne voulait pas qu’il se sente coupable de quoi que ce soit, ou qu’il s’inquiète de ce qu’il était possible qui soit arrivé. Elle n’avait eu vent de rien de particulier pendant les vacances et la plupart des étudiants avaient passé d’agréables fêtes de Noël. Elle espérait tellement que tout se passerait bien.

« Je voulais seulement savoir comment les choses se passent chez les Poufsouffle en ce début d’année. »

Je pris place comme la professeure d’arithmancie me le demanda avant de me renseigner du pourquoi elle m’avait fait venir. Cette dernière voulait juste savoir si ça se passait bien dans notre maison depuis la rentrée des vacances de Noël. Il est vrai que je prenais toujours mon rôle de préfet au sérieux, j’étais très attentif dans la salle commune et durant mes rondes. Les élèves savaient qu’ils pouvaient venir me voir en cas de problème, avoir des conseils ou tout simplement se confier s’ils le désiraient.

- Je n’ai rien remarqué d’inhabituel ou de suspect jusqu’à présent, lui répondis-je, souriant. Les plus jeunes ont encore un peu de mal à s’y retrouver dans le château, je les accompagne lorsque j’en ai la disponibilité.

Je n’aimais pas être en retard à un cours et être à l’heure, c’est montrer le bon exemple aux autres élèves. Il est exact que c’était un peu compliqué pour moi de me mettre en retard même si je l’avais déjà fait avec les professeurs compréhensibles. Je voulais tout de même faire part à la directrice des blaireaux d’une chose.

- Professeur, dis-je, hésitant. Je voulais tout de même vous signaler que ça fait quelque jours que je fais les rondes de la nuit !

Je sortis le planning des préfets et lui tendis afin que celle-ci puisse regarder pas elle-même.

- Ce n’est pas que je n’aime pas les faire, ajoutai-je. C’est juste que je sens que je vais finir par m’écrouler de sommeil et j’aimerais bien aussi pouvoir passer un peu plus de temps avec Beth à Poudlard, je veux dire...

Alice était ravie d'entendre que les choses étaient plutôt calmes en ce début d'année à l'école. Elle n'avait pas spécialement envie de se confronter au fait de devoir gérer de nombreux problèmes alors que l'année commençait à peine. Elle l'aurait évidemment fait si elle n'avait pas vu le choix, mais elle était heureuse que ce ne soit pas nécessaire. Le jeune homme avait l'air au fait de ses responsabilités et du fait qu'il était important qu'il s'occupe des élèves qui en avaient besoin. Elle attendait des préfets qu'ils guident les plus jeunes et pas seulement le soir de la rentrée.

« C'est parfait. N'oublie pas que personne ne peut te reprocher d'être en retard en classe si c'est parce que tu étais en train de répondre à tes obligations de préfet. C'est important de sécuriser tes camarades. »

Cependant, il semblait que quelque chose ne tournait pas rond. Le jeune préfet se plaignait d'avoir fait plusieurs rondes à la suite depuis quelques temps et il s'avouait fatigué. Alice pouvait le comprendre. Il n'était pas prévu qu'un seul élève fasse plusieurs nuits par semaine. Il y avait suffisamment de préfets pour que les choses soient organisées de manière à répartir les rondes entre tout le monde. Il y avait effectivement deux préfets en même temps, mais avec les quatre préfets-en-chef, cela faisait normalement une seule ronde par semaine.

Nicolas lui tendit son planning de préfet et elle constata qu'il avait effectivement été positionné sur des rondes de nuit à plusieurs reprises avec différents partenaires. Elle fronça les sourcils en se demandant si quelque âme mal intentionnée n'avait pas essayé de jouer un tour au Poufsouffle. Elle se souvenait avoir discuté avec ses collègues et il lui semblait évident que ces horaires n'étaient pas les bons. Elle allait devoir vérifier ce qui s'était passé car elle ne voulait pas que le jeune homme se retrouve pénalisé, ou qu'il pense qu'elle avait fait exprès pour le séparer de sa fille, ce qui serait totalement contraire à son éthique.

« Qui vous a donné ces horaires ? Les avez-vous reçus en personne de la part d'un professeur ? »

La professeure Wood avait raison, on ne pouvait pas me reprocher un éventuel retard même si je devais bien avouer que c’est une chose que je n'aimais pas. C’est bien pour cette raison que je faisais toujours en sorte d’arriver en avance. Cela me permettait d’aider les élèves dans les environs qui en ont besoin.

- Je sais bien, j’essaye toujours d’aider les élèves, notamment les plus jeunes qui ont parfois du mal à trouver un lieu du château.

Je décidai tout de même de parler de ses rondes de nuits à répétitions et lui tendis également mon planning de préfet. La tête du professeur d’arithmancie changea en voyant cela et comme je m’y attendais, cette dernière me posa des questions. Je me mis à réfléchir puisqu’il datait d’il y a deux semaines. Il est vrai que je n’avais pas vraiment regardé qui s'était étant donné que j’étais pressé ce jour-là.

- Non, ce n’est pas un professeur, plutôt un élève, répondis-je. Je dois tout de même vous avouer que je suis incapable de le reconnaître.

Est-ce que c’était l’un des préfets ? Je l’ignorais et j’avais probablement fait une erreur en ne prêtant pas attention à mon interlocuteur. Est-ce que c’est une erreur du professeur qui lui avait donné ou bien une farce de l’élève ? Telle est la question que je me posais.

- Vous en pensez quoi ? Demandai-je. Une erreur ou bien une farce, professeur ? Je vous avoue que ça m’énerverait que je me sois fait avoir si c’est une blague.

Intérieurement, je ruminais, mais ça se voyait sur mon visage.

Les plus jeunes élève de l'école, notamment ceux qui n'avaient pas un grand frère ou une grande sœur dans l'établissement, pouvaient facilement se perdre quand ils arrivaient à l'école. C’était logique, parce qu'il y avait beaucoup de dédales et que, évidemment, personne n'avait pensé à fournir aux premières années un plan de l'école. Mais Alice savait bien que Nicolas se montrait extrêmement sérieux dans son travail de préfet et essayait au maximum d'aider les plus jeunes à trouver leur chemin. Elle n'avait jamais eu aucun doute sur le fait que le petit-ami de sa fille soit sérieux et respectait les responsabilités qui lui incombaient.

« Je n'en doute pas. Cela dit, ne t'inquiète pas. Plus les mois vont passer et moins ils auront de mal à trouver le chemin, comme cela se passe tous les ans. »

Alice ne voyait pas comment quelqu'un aurait pu commettre une erreur en donnant son emploi du temps à Nicolas. Il y avait plus de chances que ce soit intentionnel et ça ne lui plaisait pas. Elle avait au moins la confirmation qu'il avait bien reçu ce planning de la part d'un élève et non d'un professeur, mais il affirma qu'il serait bien en peine de le reconnaître. Elle commençait à connaître le préfet de Poufsouffle et il n'était pas vraiment physionomiste, mais si quelqu'un devait avoir tenté de le priver de son repos, Alice avait bien l'intention de l'identifier et de lui faire comprendre que ce n’étaient pas des choses avec lesquelles plaisanter.

« Voilà qui est fâcheux », dit-elle pensivement.

Elle voyait bien qu'il commençait à s'agiter et son premier réflexe aurait été de calmer le jeu mais elle ne se voyait pas lui mentir pour autant. Et plus elle y pensait, moins elle voyait comment cela pourrait être le fruit d'une erreur. Elle frappa le planning du bout de sa baguette et les horaires se corrigèrent automatiquement, indiquant au préfet qu'il n'avait des rondes qu’à intervalles régulières en cohérence avec le nombre qu'ils étaient au total. Définitivement, le planning avait été modifié. Mais elle avait bien l'intention de découvrir qui avait fait ça et s'il s'agissait d'une des personnes qui avait été choisi pour cette responsabilité, il perdrait sûrement ses privilèges pour avoir montré une telle irresponsabilité en l'occurrence.

« Je ne vois pas comment cela pourrait être une erreur, sincèrement, Nicolas. Mais je te promets que le responsable ne s’en tirera pas comme ça. Ce n'est pas juste une plaisanterie. Te contraindre à t'épuiser aura de graves conséquences. »

La directrice de poufsouffle ne doutait pas de moi, cependant elle avait raison aussi en disant que ça allait être de moins en moins de trouver des élèves perdus. Il y a toujours moyen de les aider d’une manière ou l’autre. Je ne savais pas trop quoi lui répondre hormis de lui sourire, ce qui est tout de même une chose rare de ma part. Cela me permettait également de réfléchir afin de ne pas nier la maman de Beth quand même.

- Je fais toujours du mieux que je peux, professeur. Certains élèves ne sont pas toujours faciles ni respectueux envers les préfets. Je n’hésite pas à leur dire bien évidemment.

Je ne pouvais pas rester sans rien dire à propos des rondes de nuits qui sont nombreuses, cependant je ne savais pas si la personne serait retrouvée. Je ne pouvais pas le reconnaître malheureusement. J’étais conscient que ça n’aiderait pas à retrouver le coupable, pourtant la professeure Wood m’assura que ce n’était pas une erreur. J’essayais de repenser à la personne tout en ruminant en moi tellement ça m’énervait de ne pas m’en souvenir. Celle-ci ferait tout pour que l’élève en question est puni.

- Comment comptez-vous faire ? Demandai-je. Vous n'avez aucune piste actuellement.

Mon interlocutrice avait raison, je pourrais avoir des conséquences graves sur ma santé à m’épuiser comme ça.

- J’aurais dû, vous en parlez avant. Je suis fautif d’avoir rien dit pendant autant de temps, professeur.

Je reconnaissais mon erreur, je n’étais pas du genre à me plaindre et tenait toujours tout en moi.

Il y avait toujours des élèves qui étaient en conflit avec l’autorité. La plupart des élèves de l’école, fort heureusement, étaient obéissants et gentils, bien élevés, et songeaient davantage à étudier qu’à faire des niches aux professeurs et aux préfets. Mais il y avait toujours quelques fripons pour agir différemment. Quelques-uns le faisaient en étant tout-à-fait innocents avec quelques blagues ou plaisanteries sages. Mais certains n’étaient pas aussi innocents que ça et avaient l’habitude de provoquer ou d’insulter les figures d’autorité. Alice comprenait que ce soit difficile pour Nicolas, mais il fallait avoir la tête solide pour assurer le rôle de préfet.

« Malheureusement, il faut avoir un peu de carrure pour être préfet, la plupart du temps. Mais je suis sûre que tu as ce qu’il faut. »

Elle ne savait pas encore comment elle allait faire pour retrouver le responsable, mais elle avait bien l’intention de s’assurer que les choses prennent la bonne tournure. Il n‘était pas question de laisser un préfet se faire maltraiter ou abuser, compte-tenu du fait que les responsabilités d’une telle position étaient importantes. Mais l’avantage, c’est qu’elle pouvait parler aux différentes personnes qui avaient été impliqués dans l’organisation et retrouver le petit plaisantin qui avait cru bon de se moquer du monde. Il n’allait certainement pas apprécier les conséquences de son geste, voilà au moins une certitude. Alice pouvait être gentille, mais elle pouvait aussi se montrer sévère.

« Ne t’en fais pas. Punir le responsable, ce sera mon affaire. Pour le moment, je souhaiterais que tu prennes le temps de te reposer et que tu fasses attention à ne plus te laisser manipuler. »

Il allait falloir faire preuve de vigilance, globalement. Betty aussi était préfète, et Alice ne voulait surtout pas que sa fille soit la cible de plaisantins comme c’avait été le cas pour Nicolas. Il s’en voulait de ne pas l’avoir alertée plus tôt, mais elle pouvait difficilement lui reprocher sa résilience et son envie de bien faire. Elle avait seulement peur qu’à force de trop s’en demander, il ne finisse par craquer. Elle savait que c’était une possibilité. Les élèves qui avaient plus de responsabilités que les autres devaient veiller sur eux-mêmes mais aussi sur leurs condisciples dans le même cas qu’eux.

« Je ne t’en veux pas, mais oui, il vaut mieux alerter vite. Si un autre préfet a eu le même souci, tu le mets aussi en danger. Imagine qu’il s’agisse de Betty. »

J’en étais conscient qu’il fallait qu’il faut certaines compétences pour devenir un préfet et si j’avais été choisi pour ce rôle, c’est que je les avais. Il est vrai aussi que vu le caractère que j’avais, ce rôle me permettait de le forger.

- Probablement que oui, professeur. Même si je doute que ça soit suffisant actuellement. La preuve en est que je me suis fait avoir avec mon planning.

Je me demandais toujours comment elle allait trouver le comptable, mais je n’en saurais pas plus. L’institutrice voulait que je me repose et que je ne m’en préoccupe pas. Je ne comptais pas insister puisque ça ne servait à rien, je n'en avais pas vraiment la force non plus. Je ne pouvais pas la contredire non plus, il fallait que je pense à moi pour le moment même si ça serait compliqué.

- J’aimerais juste être au courant de la personne qui a commis la farce, je voudrais discuter avec cette personne. Je souhaite comprendre le pourquoi il m’a fait ça.

J’avais commis l’erreur de ne rien dire avant, mais la directrice ne m’en voulait pas et c’était le principal. Mon cœur s’emballa lorsqu’elle mentionne le nom de ma petite amie et je commençais à m’inquiéter.

- Quoi ? Mais c’est affreux, je ne supporterai pas qu’elle subisse ça, professeur ! J'aurais dû réagir plus tôt, pourquoi ? Mais pourquoi n’ai-je pas réagi plus tôt ?

Je m'en voulais intérieurement et serrai les poings sans même m’en rendre compte. Je ne savais même pas si je me contrôlerais si ça lui arriverait devant le coupable.

Nicolas était quelqu'un de très gentil, peut-être trop. Il avait été choisi comme préfet avant que Alice ne soit directrice de la maison et n'apprenne à le connaître. Et il devait y avoir de très bonnes raisons pour qu'il ait eu ce poste. Mais elle devait reconnaître que ce genre de situation devait être traitée avec la rigueur qui convenait lorsqu'on était un préfet. Autrement, on se retrouvait dans une situation impossible et on était à la merci du premier plaisantin venu. Être préfet ne voulait pas forcément dire que l'on était une personne sévère ou dangereuse, mais il fallait se faire respecter.

« Pourquoi crois-tu que tu aies été choisi au départ ? Il y a une raison qui a fait de toi le choix des professeurs pour être préfet. Tu dois te souvenir de ces capacités pour pouvoir affronter les épreuves qui font partie de la tâche. »

Elle en était elle-même passée par là, puisqu'elle avait été préfète en son temps et elle se souvenait que cela pouvait être compliqué avec des condisciples qui se refusaient à accepter l'autorité. En effet, pour ces personnes, peu leur importait que leurs camarades soient aimables ou non, il était évident que c’étaient des ennemis, et c'était comme ça qu'ils étaient traités. Bien entendu, la démarche de vouloir parler à cette personne était des plus louables et correspondait bien à ce que devait faire un préfet face à un élève en difficulté comportementale.

« C'est très bien de ta part de vouloir discuter et faire le point avec la personne concernée sur les raisons de son geste. Tu pourrais parvenir à comprendre si elle est en colère après toi, après l'autorité en général, ou s'il ne s'agit que d'une aimable plaisanterie pour lui. Charge à toi dans le dernier cas de lui faire comprendre les conséquences que son geste peut avoir. »

Nicolas avait toujours tendance à réagir de façon excessive lorsque Beth était concernée. Elle ne l'était pas vraiment au sens strict du terme, puisqu’elle n'avait rien subi en l'occurrence. Mais il était évident que n'importe quel préfet pouvait être la cible de ce genre de plaisanterie et elle faisait partie des préfets potentiels. C'était pour cette raison que Alice l'avait montrée en exemple. Elle ne pensait pas vraiment que quelqu'un s'en prendrait à sa fille. Cela dit, si l'on voulait toucher l'autorité, en sachant que Beth était la petite amie d'un autre préfet et la fille d'une prof, elle pourrait être une cible de choix.

« Calme toi, il ne lui est rien arrivé. Mais c'est aussi pour les autres élèves et notamment les préfets dans le cas présent que tu dois faire attention à ce que tu fais et ne pas essayer de te sacrifier. Ce n'est pas le but. »

La question du professeur Wood était une que je me posais depuis que j’avais reçu l’insigne de préfet. Je n'étais donc pas capable d’y répondre moi-même malheureusement. Cette dernière m’expliqua qu’il y avait une raison du choix de professeur en ce qui me concernait. Je devais me souvenir de mes capacités une fois que je les avais trouvées. Il est clair que je ne savais pas où elle voulait en venir.

- Je ne suis pas quelqu’un qui a un fort caractère pourtant, donc je dois bien avouer que je ne vois pas trop quelle est cette raison.

Elle trouve mon initiative d’aller parler avec le coupable et de comprendre pourquoi il avait fait ça. C’était à moi de juger quelle serait la sentence ce dernier méritait. Je ne m’étais jamais retrouvé dans cette situation, mais ça ne me reculait pas pour autant. Je ne savais pas à qui m’attendre c’est vrai, mais bon…

- Je veux faire pour un mieux en tout cas et on verra ce que cela donnera, professeur Wood.

Je réagis au quart de tour lorsque cette dernière parle de ma petite amie en disant qu’il ne lui était rien arrivé et je soupirai de soulagement. Le professeur Wood voulait me faire prendre conscience que je ne devais pas me sacrifier. Celle-ci n'avait pas tort, mais j’étais ainsi, comme toute ma famille d’ailleurs.

- Je sais, mais je ferai tout pour la protéger. Je n’ai plus envie qu’elle soit agressée comme l’année dernière.

Même s’il fallait bien le reconnaître, c’est ce qui a permis à ce que nous soyons un couple à ce jour.

Quand elle était elle même étudiante et qu'elle avait été choisie comme préfète, Alice s'était posé la même question car elle n'avait pas l'impression d'avoir non plus un très fort caractère. Et puis, elle avait découvert qu'elle avait plus de caractère qu'elle ne le pensait, au départ. Mais c'était surtout le contact avec sa sœur, même avant qu'elle ne sache qui elle était, qui lui avait donné cette considération. Elle ne pouvait pas savoir à quel point sa situation était différente de celle de Nicolas, mais elle savait que l'on n'avait pas forcément conscience de sa propre valeur jusqu'au moment où quelqu'un vous la mettait en évidence.

« Tu es respectueux et altruiste, et tu as peut-être plus de force en toi que tu ne le crois. Tu as fait preuve de naïveté, et tu devras sans-doute faire attention à cette part de ta nature dans l'avenir, mais ça ne veut pas dire que tu n'es pas fait pour ce poste. Bien entendu, si tu trouves que c'est trop de responsabilités pour toi, je peux tout à fait faire une demande de changement de préfet, mais je ne suis pas sûr que ce soit ce que tu souhaites. »

Alice espérait que l'élève concerné comprendrait qu'il avait commis une erreur et qu'il ne s'agissait pas d'une innocente farce mais que cela pouvait nuire au bien-être d'un élève. S'il ne le comprenait pas, cela voulait dire qu'il était volontairement agressif ou blessant à l'égard d'un camarade et il y avait probablement autre chose là-dessous qu'un simple mal-être. Alice savait que, dans ce cas, un professeur ou un membre du personnel devrait intervenir pour aider Nicolas pour remettre l'élève concerné dans le droit chemin. Elle savait qu'il y avait des fortes têtes que l'on pouvait difficilement raisonner, mais elle ne voulait pas penser au pire.

« N'hésite pas à te confier à un adulte si tu vois que la situation ne peut se débloquer autrement. »

Alice avait mis longtemps avant de comprendre elle-même à quel point le sens du sacrifice pouvait être contre-productif. Elle aussi aurait donné sa vie pour bien des personnes qui avaient fait partie de son univers. Et elle s'était rendu compte qu’en ne disant rien et en acceptant de souffrir en silence, elle avait généralement omis de mettre en lumière des comportements qui pouvaient être dangereux pour ses camarades. C’était pourtant simple. Il fallait éviter de donner du crédit à certains comportements parce que même si on se fichait de soi-même, on ne pouvait jamais être la cible exclusive.

« C'est justement pour la protéger que tu ne dois pas agir à nouveau de cette façon. Tu as le sentiment de te sacrifier pour les autres, mais tu empêches qu'une situation soit connue, qui pourrait éviter à d'autres personnes de souffrir. Parfois un choix que l'on croit égoïste est, en fait, le plus altruiste de tous. Moi non plus, je n'ai pas envie qu'elle se retrouve à nouveau blessée, et je suis heureuse que tu sois arrivé à temps ce jour-là. Je ne le répéterai jamais assez. »